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Interview de Bruno Dupont : le jeu de société en animation et formation socioculturelles

Interview de Bruno Dupont : le jeu de société en animation et formation socioculturelles

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Bruno Dupont est Docteur en Langues et Lettres à la Haute École de la Ville de Liège. Dans le cadre de ses recherches, il poursuit une étude exploratoire des pratiques du jeu de société en animation et formation socioculturelles. Ce projet d’étude est lauréat du programme pour l’éducation et la jeunesse de l’appel à projet du Game in lab, soutenu par la Fondation Libellud. Dans un entretien qui nous éclaire sur la dynamique du jeu dans le secteur socio-culturel, Bruno Dupont nous livre l’origine et la portée de son étude.

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je m’appelle Bruno Dupont, je suis Docteur en Langues et Lettres et travaille dans le domaine des sciences du jeu depuis ma thèse de doctorat. Je travaille tout autant sur les jeux vidéo (à la Katholieke Universiteit Leuven) que sur les jeux de société (à la Haute École de la Ville de Liège). Parallèlement, je suis également formateur en éducation non formelle et permanente. Mes recherches concernent d’une part les dispositifs médiatiques hybrides et d’autre part les rapports entre jeu et éducation, principalement non formelle.

Depuis mars 2020, notre Haute École a lancé une collaboration avec des collègues de la Haute École Bruxelles-Brabant, Jean-Emmanuel Barbier et Virginie Tacq, sur l’utilisation du jeu de société en animation et formation socioculturelles. Par la suite, Alexis Messina a rejoint l’équipe côté Haute École de la Ville de Liège.

Votre travail de recherche repose sur une étude exploratoire des pratiques du jeu de société en animation et formation socioculturelles. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agit ?

Il s’agit d’aller interroger les acteurs et actrices de terrain dans la formation et l’animation (mouvements et organismes de jeunesse, associations à but social, centres de formation socioculturelle, centres d’art et de créativité qui travaillent avec divers publics, etc.) au sein de la partie francophone de la Belgique. Nous souhaitons apprendre comment ils et elles utilisent (ou non) le jeu de société dans leurs pratiques : dans quels buts, de quelle manière, avec quels publics, et moyennant quelles facilités et difficultés. Pratiquement, nous établissons des listes de professionnels et bénévoles de l’animation et/ou de la formation en visant un échantillon varié, puis contactons les personnes en vue d’un entretien semi-directif.

Quels sont les objectifs de cette recherche ?

Nous voulons tout d’abord établir une cartographie des pratiques de jeu de société dans le domaine de l’animation et de la formation socioculturelles, car ce domaine est encore très méconnu de la recherche. Que font précisément les animateurs et animatrices avec le jeu de société ? Quels jeux sont-ils utilisés ? Quel est le lien avec les buts poursuivis par les organismes pour lesquels ils et elles travaillent ? Quels sont les besoins comblés et restant à combler dans cette utilisation ?

Ensuite, nous voulons synthétiser ces pratiques, qui à première vue semblent très variées, éparses et liées à des contextes et des parcours précis. Le but est de pouvoir revenir vers le terrain avec ces éléments synthétisés : nous travaillons donc avec le secteur concerné, pour le secteur concerné. Dans cette optique, la création finale de notre projet, qui peut évoluer en fonction des interviews que nous sommes en train de mener, est prévue sous la forme d’une valise d’animation-formation contenant des jeux, des informations pédagogiques sur leurs utilisations possibles, du matériel pour les modifier, et peut-être d’autres outils issus de ce que nous auront transmis nos participantes et participants.

Bien entendu, dans l’après-étude, se posera la question de l’extension possible des résultats obtenus : sachant qu’il existe de nombreux ponts entre éducation non formelle et enseignement, ainsi que vers la formation et l’action sociale au sens large, il sera intéressant de voir en quoi les pratiques que nous mettrons au jour sont ou non transposables dans d’autres contextes…

Le jeu de société est-il une pratique répandue dans l’animation et la formation socioculturelle ?

L’idée de cette recherche est née d’une impression « de terrain » que mes collègues et moi-même avons partagée : étant tous et toutes actifs dans différentes parties du secteur socioculturel parallèlement à notre travail scientifique, nous avions le sentiment que le jeu de société y était beaucoup utilisé, et que cette utilisation allait de pair avec des questionnements spécifiques et des adaptations liées aux contextes. Cette impression semble se vérifier dans nos premiers entretiens, mais nous devons encore interroger plus de personnes et procéder à l’analyse des données pour voir si cette intuition se vérifie.

Quelle est l’origine de cette étude ? Pourquoi porter une attention particulière au jeu de société ?

Récemment, plusieurs chercheurs et chercheuses se sont intéressés à l’usage du jeu dans le domaine de l’animation, supposant (avec raison, je pense) que la dimension ludique était centrale dans ce secteur. Cependant, ces recherches concernent surtout le jeu dit « traditionnel » (les jeux de camps de vacances, de cour de récréation, qui font partie d’une sorte de mémoire intemporelle) ou le jeu vidéo, assez peu le jeu de société, qui est souvent mentionné comme important (par exemple chez Baptiste Besse-Patin) mais pas étudié en détail. Nous avons donc voulu lui consacrer l’attention qu’il nous semble mériter.

Où en sont vos travaux aujourd’hui ? Auprès de qui réalisez-vous vos recherches ?

Nous avons commencé à interviewer les professionnels et professionnelles, mais aussi les bénévoles, issus des régions de Liège, du Brabant Wallon et de Bruxelles. Parallèlement, nous retranscrivons leurs interviews pour pouvoir les analyser par la suite. Grâce au subside Game in Lab / Fondation Libellud, nous pourrons dès mi-novembre commencer à interroger des personnes actives dans les autres parties de la Belgique, vers Namur et la Province du Luxembourg (autour d’Arlon).

Combien de temps dure un projet de recherche de ce type ? À quel moment votre étude devrait aboutir ?

Le projet « Faire société » dans sa totalité doit durer un an, soit jusqu’en mars 2022. La partie « Namur-Luxembourg », concernée par le soutien du Game in Lab et de la Fondation Libellud, s’étendra normalement de novembre à janvier.

Vous êtes lauréat de l’appel à projet de Game in lab en partenariat avec la Fondation Libellud. En quoi ce soutien va-t-il aider vos travaux ?

Ce soutien est crucial car il nous permet d’ajouter les deux provinces qui manquaient à notre échantillon pour aboutir à un quadrillage complet de la Belgique francophone. Cela augmente la représentativité de notre étude, car la Communauté Française de Belgique forme un tout institutionnellement parlant dans le domaine de la culture et de la jeunesse, des compétences dont dépend l’animation socioculturelle. Nous pouvons ainsi interroger toutes les personnes qui partagent un cadre légal (décrétal) donné et voir de quelle manière elles se positionnent par rapport à celui-ci. La variation géographique, mais aussi philosophique (l’orientation politico-citoyenne des organismes étudiés) ainsi que socio-démographique (notamment les différences entre régions très et peu urbanisées) peut dès lors être étudiée dans toute son ampleur.

Tout à fait pratiquement, le subside obtenu nous permettra d’engager un ou une collègue responsable de la partie Namur-Luxembourg et de lui partager notre méthodologie, tout en couvrant les frais logistiques liés à l’extension du périmètre de recherche. Last but not least, le réseau Game in Lab, déjà très actif, nous permet de faire connaître notre projet auprès des scientifiques et du personnel de terrain, et nous met en contact avec des partenaires et soutiens extérieurs.

Ils jouent pour imaginer le futur

Ils jouent pour imaginer le futur

chloe germaine paul wake

Quand ils ne jouent pas, Chloé Germaine et Paul Wake sont chercheurs à la Manchester Metropolitan University. Leur récent travail de recherche s’appuie sur le jeu et ses ressorts pour aborder la crise climatique et imaginer un futur plus radieux. Ce projet d’étude est lauréat de l’édition 2021 du programme pour l’éducation et la jeunesse du Game in lab, soutenu par la Fondation Libellud.

Depuis Manchester, les deux fervents joueurs nous invitent à la réflexion sur le rôle du jeu et des jeunes dans la construction d’une réponse au défi climatique. Rencontre.

Bonjour Chloé, bonjour Paul ! Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Bonjour, je m’appelle Chloé Germaine. Je suis enseignante universitaire et chercheuse à la Manchester Metropolitan University, au Royaume-Uni. J’enseigne la littérature anglaise. Mes recherches portent sur les jeux analogiques (jeux de société et jeux de table), l’environnement et les jeunes. Je suis également conceptrice de jeux et j’écris des jeux de rôle. 

Bonjour ! Je m’appelle Paul Wake et je suis également universitaire au département d’anglais de la Manchester Metropolitan University où j’enseigne et mène des recherches sur la théorie narrative et les jeux. Mon travail porte essentiellement sur les jeux analogiques et les livres de jeux, et j’ai conçu deux jeux sur la crise climatique – un jeu de cartes appelé Carbon City Zero et une extension “Global Warming” pour le jeu de plateau Catan® de Klaus Teuber.

En quoi consiste votre projet de recherche ?

Notre projet vise à déterminer comment les jeux de société peuvent aider les jeunes à comprendre la crise climatique et à agir en conséquence. La crise climatique est un problème social et un défi imaginatif qui touche tout le monde, mais l’avenir des jeunes est particulièrement concerné. 

Les chercheurs considèrent depuis un certain temps les jeux de société comme un outil d’éducation climatique, mais nous pensons qu’ils peuvent également être un moyen par lequel les jeunes peuvent explorer et communiquer leurs idées sur le changement climatique, la transformation sociale et l’avenir. 

Dans ce projet, les jeunes joueurs travaillent avec nous en tant que co-chercheurs et nous sommes intéressés par leurs idées sur la façon dont nous pourrions créer de meilleurs jeux de société pour aborder la crise climatique.

Quelle est l’origine de ces travaux ?

Nous avons tous deux travaillé sur le changement climatique de différentes manières. Paul a conçu le jeu de cartes collaboratif Carbon City Zero (avec Sam Illingworth, de l’Université Napier d’Édimbourg) pour l’organisation caritative Possible. Le jeu a été lancé sur Kickstarter en 2020, puis il a été utilisé pour sensibiliser divers publics à la question du changement climatique. 

Chloé a travaillé avec Benjamin Bowman sur un autre projet de recherche participative utilisant la lecture et l’écriture créative pour aider les jeunes à explorer leurs idées sur le changement climatique. Ce projet s’est inspiré de la créativité que les jeunes ont développée lors des manifestations pour le climat Fridays for Future

Nous avons pensé que les jeux étaient un support idéal pour développer ce travail avec les jeunes. Les jeux de société encouragent le jeu collaboratif, la discussion et la réflexion et nous les avons vus non seulement comme un moyen d’engager les jeunes sur la question de la crise climatique, mais aussi comme une méthode de recherche créative pour explorer davantage les idées des jeunes sur le changement climatique.

Comment le jeu de société peut-il aider à mieux comprendre la crise climatique ?

C’est une très bonne question, et c’est en partie ce que nous espérons découvrir à travers nos recherches. Notre projet ne vise pas tant à communiquer des informations sur la crise climatique qu’à engager les participants dans des conversations et à favoriser une réflexion active et critique.

Ainsi, plutôt que d’aider les participants à comprendre la crise climatique, nous espérons pouvoir nous appuyer sur les connaissances qu’ils ont déjà sur le sujet – les voix des jeunes sont incroyablement importantes et nous espérons pouvoir y accéder par le biais du jeu et de la conception de jeux.

Quelle sera la durée de votre étude ?

Nous disposons d’un financement pour douze mois, au cours desquels nous organiserons un hackathon et une série de groupes de discussion avec nos jeunes co-chercheurs.

Comment vont se dérouler vos travaux ?

La phase de planification, que nous menons actuellement, consiste à recruter des jeunes pour travailler avec nous et à présenter les jeux que nous voulons explorer dans nos ateliers. Les jeunes auront, en fin de compte, le dernier mot sur les jeux que nous étudierons.

Nous passerons ensuite à la phase d’atelier, au cours de laquelle nous travaillerons avec un artiste – Matteo Menapace – pour “bidouiller” (“to hack” en anglais) des jeux de société existants avec nos jeunes co-chercheurs, afin de trouver des façons différentes de jouer à ces jeux.

Notre étude utilise des groupes de discussion pour réfléchir aux ateliers, explorer de nouveaux principes de conception et aider les jeunes à exprimer leurs idées sur le changement climatique qui ont émergé pendant le jeu. 

Qui seront les jeunes avec lesquels vous travaillerez pour mener cette étude ?

Nous travaillons avec des jeunes âgés de 16 à 19 ans de la région du Grand Manchester, au Royaume-Uni. Nous encourageons les petits groupes d’élèves des écoles de la région à s’inscrire. Les jeunes n’ont pas besoin de s’identifier à des “activistes climatiques” pour prendre part à cette étude. 

En fait, certains d’entre eux rencontrent même des obstacles à la participation à l’action climatique et ne se considèrent pas comme des écologistes. Nous pensons que les jeux peuvent être un bon moyen d’inclure davantage de jeunes dans les conversations sur le changement climatique.

Nous avons souvent l’impression que les jeunes en savent beaucoup plus sur le climat et sont plus impliqués sur ces questions. Pourquoi se concentrer sur eux ?

Depuis cinq ans, les jeunes sont à l’origine de l’appel à l’action sur le changement climatique. Ils sont bien informés sur les faits, très organisés et motivés pour se faire entendre. Ils s’intéressent également à la justice climatique et à la création d’une solidarité entre les groupes qui sont affectés différemment par le changement climatique.Ce mouvement a beaucoup à nous apprendre sur la manière de plaider pour le changement dans la société.

Cependant, il est injuste de faire porter tout le poids de l’activisme climatique sur les jeunes, alors qu’ils sont les plus touchés par ce phénomène. Les jeunes sont toujours exclus du pouvoir politique et des institutions et leurs appels à la justice climatique sont souvent ignorés. Nous nous demandons comment nous pouvons mieux soutenir les jeunes et être leurs alliés. L’un des moyens est de soutenir leur éducation climatique, ce que fait ce projet.

Cependant, nous voulons aussi amplifier la créativité des jeunes. Comme le dit notre co-chercheur Ben Bowman dans son travail sur les grèves du climat (Fridays for Future), les jeunes impliqués dans l’action climatique ne se contentent pas de formuler une série de revendications politiques : ils essaient d’imaginer un monde meilleur. 

Nous pensons que les jeux et le game playing peuvent soutenir ce processus. Nous pensons également que les jeunes ont beaucoup à offrir aux concepteurs et éditeurs de jeux et que leurs idées sur le changement climatique seront utiles pour développer de meilleurs jeux sur le sujet. 

Comment votre projet pourrait-il influencer le jeu de société de demain ? 

Notre méthodologie repose sur le hacking. Nous voulons remettre en question l’idée que les jeux sont des “produits” et qu’il n’y a qu’une seule façon d’y jouer. Le “piratage” des jeux nous aidera à trouver de nouvelles façons de jouer et de penser. À partir de cette méthode, nous espérons développer une ludographie annotée, rédigée par nos jeunes co-chercheurs, qui commentera les jeux existants qui, selon nous, sont utiles pour explorer la crise climatique.

Nous souhaitons également aider nos jeunes co-chercheurs à élaborer des principes de conception de jeux que nous partagerons avec des concepteurs et des éditeurs. Nous pensons que leurs idées seront précieuses pour la prochaine génération de jeux sur le changement climatique.

Vous êtes l’un des lauréats de l’appel à projets Game In lab. Comment l’avez-vous connu ?

Nous cherchions des moyens de relier nos recherches à l’industrie et nous avons découvert le travail de Game In Lab dans ce processus.

Comment cela va-t-il aider votre travail ?

Le financement que nous avons reçu de Game in Lab nous aidera de plusieurs manières. En plus de nous permettre de couvrir les coûts liés à la fourniture de matériel dont nos participants ont besoin, le soutien de Game in Lab pour la promotion de notre travail auprès du public le plus large possible est inestimable.

Interview de Léa Martinez : l’effet des jeux de société sur nos fonctions cognitives

Interview de Léa Martinez : l’effet des jeux de société sur nos fonctions cognitives

Léa martinez jeux de société

En 2018, le groupe Asmodee, dont la Fondation Libellud fait partie, a créé Asmodee Research, un département dédié à la promotion et au développement de projets interdisciplinaires sur le jeu de société.

Fin 2020, Léa Martinez, doctorante en psychologie à l’Université de Poitiers, rejoint l’équipe d’Asmodee Research et de Game In lab pour y réaliser sa thèse. Elle nous éclaire sur le rôle de la science dans l’univers du jeu de société.

Bonjour Léa, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je suis Léa Martinez, doctorante en psychologie à l’Université de Poitiers, au CeRCA (Centre de Recherches sur la Cognition et l’Apprentissage) et je fais partie de l’équipe Asmodee Research qui soutient mon projet de thèse.

Vous réalisez une thèse CIFRE. De quoi s’agit-il ?

Une thèse CIFRE (convention industrielle de formation par la recherche) est un partenariat entre un laboratoire de recherche et une entreprise qui permet de soutenir un doctorat. Dans mon cas, l’entreprise Asmodee, au travers du programme de soutien à la recherche sur les jeux de société Game in Lab, finance mon projet de thèse que je réalise au CeRCA de Poitiers. La thèse a débuté fin 2020 et durera 3 ans au total – il s’agit de la durée classique d’une thèse CIFRE.

Comment ce travail s’articule-t-il entre l’Université et Game in Lab ? Quels sont les bénéfices d’une telle convention ?

Je partage mon temps entre le laboratoire et l’entreprise. Pour la majorité du temps, je réalise mes travaux de recherche au sein de mon laboratoire et je travaille en parallèle avec Asmodee et Game in Lab.

Réaliser ma thèse sous convention CIFRE me permet de porter mon projet à bien dans un laboratoire de recherche qualifié, tout en profitant du soutien et de l’expérience d’une entreprise spécialisée. Cette convention m’offre aussi une ouverture professionnelle plus importante.

Quel est l’objet de vos travaux de recherche ?

Mes travaux de recherche portent sur l’effet de la pratique des jeux de société sur le
développement des fonctions cognitives. Notre objectif est donc de mieux comprendre comment les jeux de société peuvent influencer, et sûrement améliorer, les fonctions mentales chez les adultes et les adolescents.

Comment mesure-t-on l’impact de la pratique des jeux de société sur les fonctions cognitives ?

Une façon de mesurer l’effet des jeux de société sur nos fonctions cognitives est de réaliser des entraînements. Il s’agit de rencontrer des participants et de comparer leurs performances à des tests cognitifs avant et après une période contrôlée de pratique de jeux de société. Si les performances après l’entraînement sont meilleures que celles avant l’entraînement, les bénéfices peuvent être expliqués par la pratique ludique ainsi réalisée.

Quelle est l’origine de cette étude ? Comment sait-on que la pratique du jeu de société peut avoir un impact sur les fonctions cognitives ?

Nous savons que les loisirs et la pratique ludique sont souvent bénéfiques pour le fonctionnement cognitif. En particulier, les jeux de société modernes offrent une variété de mécanismes ludiques susceptibles d’améliorer nos fonctions mentales. De premières études ont d’ailleurs déjà montré que les jeux de société permettaient une amélioration des apprentissages. Il nous semble donc pertinent de mieux comprendre quels sont leurs effets et de confirmer leurs bénéfices sur le fonctionnement cognitif.

Allez-vous réaliser des recherches sur le terrain ? Auprès de quels publics ?

Bien que le contexte sanitaire nous demande d’adapter nos recherches, nous allons pouvoir travailler « sur le terrain », rencontrer des participants et organiser des sessions de jeu. Comme nous nous intéressons au développement des fonctions cognitives, nous rencontrerons des adultes et des adolescents. Nous proposerons à nos participants adultes de venir directement dans notre laboratoire de recherche, où nous disposons de l’espace et du matériel nécessaire à nos travaux. Pour nos participants adolescents, nous pourrons nous rendre dans des établissements scolaires, avec lesquels nous nous organiserons au préalable pour rencontrer des élèves. Pour chaque étude, l’objectif est d’avoir un environnement de recherche contrôlé.

Où en sont vos travaux à ce jour ?

La thèse a commencé depuis bientôt un an. Nous lançons donc actuellement nos premières
recherches qui devraient nous donner des résultats au cours de l’année 2022 !

Comment les résultats de vos travaux de recherche peuvent-ils influencer le jeu de société de demain ?

Nos travaux de recherche permettront de mieux comprendre les influences des jeux de société sur les joueurs, d’un point de vue cognitif. Ils permettront donc de mieux saisir comment le jeu de société moderne peut être utilisé pour améliorer des fonctions ou des apprentissages ciblés. Si nos travaux n’influenceront pas directement la forme des jeux de société de demain, ils restent une ouverture à la compréhension et la prise en compte des effets cognitifs des mécanismes de jeux sur les joueurs.

SOLFAEH recherche des partenaires pour aider les familles d’enfants hospitalisés

SOLFAEH recherche des partenaires pour aider les familles d’enfants hospitalisés

solfaeh un hopital pour les enfants

À Poitiers, l’association Un Hôpital Pour les Enfants œuvre pour améliorer, avec les soignants, l’accueil et les conditions de vie des enfants et adolescents hospitalisés. Sa présence quotidienne aux côtés des familles et l’expertise de terrain de ses 6 salariés et 80 bénévoles conduit aujourd’hui l’association à mobiliser ses ressources en faveur d’un nouveau dispositif. SOLFAEH, comme il se nomme, souhaite répondre à la nécessité de soutenir les familles d’enfants hospitalisés dans le besoin.

Gilles KÉO, Directeur de l’association Un Hôpital Pour les Enfants depuis 2015 est chargé de la gestion globale de l’association et plus particulièrement de la recherche de financement. Il revient sur la genèse de SOLFAEH et sur la structuration d’un projet qui répond à un besoin jusque-là mal satisfait.

Comment est né SOLFAEH ? De quoi s’agit-il ?

SOLFAEH consiste à la création d’un réseau solidaire associatif à destination des familles d’enfants hospitalisés. Depuis plusieurs années, la présence de terrain de nos professionnels nous a permis d’identifier et de recueillir des besoins auprès des parents d’enfants hospitalisés.

En 2018, ces constats nous ont conduit à mener nos premières réflexions quant à la nécessité de soutenir les familles dans le besoin. L’ensemble des professionnels d’Un Hôpital Pour les Enfants (UHPE) a ainsi mobilisé ses compétences, ses ressources et son réseau afin d’initier la structuration de ce nouveau dispositif.

Par ailleurs, nous avons sollicité l’UDAF de la Vienne dont UHPE est membre associé. Puis nous avons fait part de nos problématiques aux autres membres pour pouvoir trouver un soutien de la part des autres associations adhérentes.

Quels sont les constats que vous réalisez sur le terrain ?

Notre association fait régulièrement face à des situations qui dépassent les limites de notre cadre d’intervention. Elles concernent la vie des familles et sont de natures diverses. Parmi ces situations rencontrées, nous soulevons plusieurs problématiques :

  • Comment faire face aux charges quotidiennes (factures,…) tout en prenant en compte la diminution des ressources au sein du foyer suite à l’arrêt de l’activité professionnelle d’un des parents pour rester auprès de l’enfant hospitalisé ?
  • Comment faire face financièrement aux différentes dépenses auxquelles les familles sont confrontées (achat de matériels adaptés, soins de confort, etc…) ?
  • Comment se restaurer de manière équilibrée à l’hôpital à moindre coût ?
  • Choix cornélien : rester auprès de son enfant malade ou être présent auprès de la fratrie (aide aux devoirs, accompagnement à l’école, etc…) ?
  • Comment entreprendre les démarches administratives quand la famille croule sous l’annonce de la maladie de son enfant ? Et à quel moment ?
  • Quand la famille est confrontée à la maladie, comment peut-elle gérer son quotidien (ex: travail, courses, ménage, trajets : par quel biais…) ?

À qui s’adresse SOLFAEH ? Qui sont les bénéficiaires du dispositif ?

Il s’adresse à toutes les familles d’enfants hospitalisés (parents et fratries). Il vient en complément du travail effectué par le service social du CHU de Poitiers et de dispositifs sociaux déjà existants dans d’autres institutions et parfois méconnus des familles qui sont focalisées sur la guérison de leur enfant.

Combien de familles sont concernées dans la Vienne par l’hospitalisation de l’un de leurs enfants ?

Sur les données statistiques 2020 du CHU de Poitiers, ce sont 7093 enfants de la Vienne qui ont été hospitalisés avec autant de familles derrière. Mais l’année 2020 est une année anormale en terme de nombre d’hospitalisation : en 2019, 8896 enfants étaient concernés dans la Vienne.

Pour faire face à vos observations de terrain, quels sont les axes d’intervention que SOLFAEH prévoit ?

Nous prévoyons de travailler sur 5 axes d’intervention pour répondre aux besoins couramment rencontrés par les familles :

  • Proposer des trajets solidaires (domicile – hôpital) pour permettre aux parents d’être présents auprès de leur enfant malade.
  • Développer une offre d’hébergement de proximité (hôtels, particuliers,…) à moindre coût ou à titre gracieux.
  • Soutenir et accompagner les familles au quotidien (aide financière, alimentation,…) : en répondant aux besoins primaires et aux sollicitations des familles si nécessaire en termes d’apports matériels (hygiène, aide vestimentaire, aide alimentaire,….) en lien avec l’assistante sociale et les services de l’hôpital jusqu’à leurs sorties de l’hôpital.
  • Compléter l’accès aux droits en lien avec les acteurs déjà présents : écouter, informer et orienter les familles, les accompagner dans leurs démarches administratives en vue de solliciter les différentes aides existantes auxquelles elles pourraient prétendre. Et pallier l’incapacité de bon nombre de familles à faire face à la fois à la maladie de leur enfant et à la méconnaissance des dispositifs existants.
  • Assurer un mode de garde auprès de la fratrie en veillant à la prise en charge des frères et sœurs de l’enfant malade au domicile afin d’assurer une certaine sérénité pour les parents concernés.

Où en est le dispositif dans son développement ?

Depuis la naissance du projet, le groupe de travail a défini une méthodologie dans le but d’en assurer la pérennité. Nous avons statué sur l’assise juridique de SOLFAEH (les statuts ont été rédigés) et nous avons engagé la recherche de financements (45 000 euros financés par la Fondation Libellud).

Pour développer correctement le projet, nous avons maintenant besoin de définir une stratégie de communication auprès des familles et des partenaires, de rassembler une équipe de bénévoles, d’identifier des personnes ressources et de commencer à constituer un réseau de partenaires. En parallèle, nous prévoyons de rechercher de nouveaux financements. Cela passera par le recrutement d’un salarié garant du développement du projet.

La crise sanitaire a malheureusement freiné les démarches, mais la persévérance de la commission nous permet aujourd’hui d’organiser une assemblée générale constitutive le 21 juin prochain afin d’élire les membres du conseil d’administration.

De quels types de structures (partenaires) auriez-vous besoin aujourd’hui pour élargir votre réseau et couvrir les axes d’intervention de SOLFAEH ?

Nous allons avoir besoin du soutien des partenaires institutionnels pour pouvoir répondre et couvrir les besoins des familles et d’associations partenaires qui pourront s’inscrire dans le réseau selon leurs compétences.

La sortie de crise devrait nous permettre de mettre en place des rencontres pour présenter le projet SOLFAEH et pour impulser une dynamique sur notre territoire.

Le dispositif SOLFAEH réunit actuellement Un Hôpital Pour les Enfants, l’UDAF de la Vienne, l’association PAULA (Pour Aider Utilement Les Autres), l’UNA 86, et JVP 86. Chaque structure intéressée a la possibilité de contribuer ou d’intégrer le réseau pour accompagner les familles d’enfants hospitalisés. Il suffit pour cela de contacter l’une des associations participantes.

SOLFAEH et la Fondation Libellud

“À ce jour, étant donné que l’association SOLFAEH est en train de se constituer, la Fondation Libellud est notre unique partenaires financiers. Nous l’avons connu car, depuis 2012, la société Libellud soutenait les actions d’Un Hôpital Pour les Enfants via un mécénat financier à hauteur de 10 000€ par an.

La Fondation Libellud, au-delà du mécénat financier précieux pour impulser ce dispositif novateur, nous accompagne pour nous conseiller et nous aider à développer la mise en place de ce projet afin d’en assurer la pertinence et la pérennité.”

Gilles Kéo

 

Accompagner les jeunes vers les métiers de la transition écologique et sociale

Accompagner les jeunes vers les métiers de la transition écologique et sociale

osons ici maintenant

En France, 70% des jeunes pensent que la société ne leur offre pas la possibilité d’exprimer ce dont ils sont capables. C’est sur ce constat que naît l’association Osons, Ici et Maintenant en 2014, à l’initiative de Soizic et Olivier Lenoir. Les deux fondateurs donnent à leur projet l’ambitieuse mission de déclencher chez leurs bénéficiaires le déclic pour passer à l’action.

Avec 100% Transition, son dernier programme en date, Osons, Ici et Maintenant invite les 16-25 ans à penser leur orientation professionnelle et à trouver une formation ou un métier dans la transition écologique et sociale.

Osons, Ici et Maintenant : une démarche hors des sentiers battus

Inspirée par les travaux D’Amartya Sen (Prix Nobel d’Économie, 1998), de Paul Ricoeur (Philosophe) et par les neuro-sciences, la pédagogie d’Osons, Ici et Maintenant (OIM) s’emploie au développement des potentialités et des capabilités de chacun.

“Nous aspirons à donner du pouvoir d’agir aux individus, indépendamment de leur territoire, de leur origine sociale, de leur genre” expliquent les fondateurs. L’association, qui compte huit antennes en France, s’appuie sur ce qu’ils sont et les aide à valoriser leur singularité.

Pensée tel un laboratoire d’innovation pédagogique, OIM décline sa démarche à travers 4 programmes qui ont vocation à accompagner les jeunes (16-35 ans de tous horizons) vers la prise de confiance, la reconnaissance, et la réalisation de leur potentiel face aux enjeux de société.

Depuis la création de l’association, 75% des personnes bénéficiaires déclarent avoir vécu le mécanisme de déclic, 87% affirment avoir gagné en confiance et 92% déclarent avoir une meilleure conscience de leur potentiel.

Ces résultats encouragent aujourd’hui OIM a expérimenter un nouveau programme à l’attention des jeunes les plus fragiles, éloignés de l’emploi, de l’éducation et de la formation. Souvent issus des zones de revitalisation rurales (ZRR) et des quartiers de la politique de la ville (QPV), ils font partie des personnes les plus concernées par les difficultés d’insertion sociale et professionnelle.

Un parcours d’accompagnement vers les métiers de la transition

“Notre ambition avec 100% Transition, c’est de permettre à 300 jeunes de 16 à 25 ans de développer leur potentiel. L’objectif premier du programme consiste à les rendre capables de s’impliquer dans une activité contributive sur leur territoire à travers une vocation dans les métiers de la transition.” explique Olivier Lenoir. Les emplois de la transition écologique et sociétale connaissent un essor considérable en France. Selon Pôle Emploi, ces secteurs pourraient créer jusqu’à 900 000 emplois dans notre pays d’ici à 30 ans.

En parallèle, de nombreuses études rendent compte d’une jeunesse soucieuse de l’avenir, préoccupée par le sort de la planète et attentives à de nouveaux modèles économiques. Ainsi, un sondage mené dans le contexte des manifestations pour le climat en 2019 indique que 61% des 18-23 ans affirment être “très inquiets” pour l’environnement (Source Diplomeo). De la même manière, près de deux tiers des 18-30 ans manifestent un intérêt pour les métiers de l’économie sociale et solidaire, non délocalisables et bénéfiques à la vitalité des territoires.

Décloisonner les approches pour un parcours sans couture

Le parcours 100% Transition, de 9 mois, alterne des temps collectifs et un accompagnement individuel, en trois phases et 8 actions (cf.schéma ci-dessous). La particularité de ce cheminement par rapport aux programmes d’accompagnement existants réside dans son approche “sans couture”.

Face à la diversité des dispositifs d’accompagnement des jeunes vulnérables, face au grand nombre d’acteurs (de la formation, de l’insertion, de l’accompagnement à la remobilisation), le programme 100% Transition prévoit une approche décloisonnée de l’orientation, de la formation et de l’emploi.

Investir sur l’innovation pédagogique pour renouveler les modes d’accompagnement

L’ambition sociétale du programme vise à structurer un écosystème cohérent et articulé d’acteurs du secteur grâce à un travail de fond en recherche et développement social.

Le parcours proposé est né de la rencontre entre cinq acteurs aux approches différentes et complémentaires et de leur volonté d’œuvrer ensemble pour une insertion sociale et professionnelle réussie des publics les plus vulnérables :

  • L’approche bienveillante et hors des sentiers battus d’Osons Ici et Maintenant,
  • Le savoir-faire de q organismes de formation (l’INSUP, l’IFRA, Equinoxe-Guyane et le CFP Presqu’Île) dans le champ de l’orientation et de l’insertion
  • L’expertise d’ELLYX dans le champ de la recherche et du développement social

“Notre travail consistera à identifier les points de blocage éventuels que pourrait rencontrer ce programme qui répond à des enjeux de société forts. C’est l’association de ces acteurs qui permettra de faire jouer la coopération comme levier d’action. L’observation, l’analyse et le questionnement permettront de travailler à l’amélioration des outils pour une meilleure adaptation au public visé. Enfin, nous mènerons une mesure d’impact social pour observer les effets produits par le programme et bénéficier d’éléments tangibles pour confirmer ou infirmer nos hypothèses et parti pris dans les modalités d’accompagnement des jeunes et de faire commun entre les membres du consortium.” explique Laura Ortiz-Rouzé de l’agence Ellyx.

L’implication des bénéficiaires dans la conception du projet fait partie intégrante de l’ADN de 100% Transition. Ce parcours intégré s’appuiera sur la contribution active de chaque jeune comme gage de réussite, de durabilité et d’engagement.

La parole aux jeunes de 100% Transition

Osons Ici et Maintenant & La Fondation Libellud

Avec 100% Transition, Osons Ici et Maintenant est lauréat du programme Eureka de la Fondation Libellud qui finance des projets qui nécessitent un déploiement constant sur plusieurs années.