“Cette crise aura au moins servi à rappeler que la qualité de vie passe par les liens”. Pour Olivier Decroix, ce qui nous apparaît aujourd’hui comme une évidence est au cœur des travaux de l’association qu’il dirige. Faiseurs de liens, c’est son nom, a vu le jour le 11 juillet 2019 à Parthenay. À l’initiative d’une poignée de bénévoles, l’association promeut et accompagne les actions de celles et ceux qui œuvrent à l’amélioration de la connaissance de soi et des relations interpersonnelles chez les enfants et les adolescents.
De la nécessité de travailler les compétences psychosociales
Les Faiseurs de liens sont des professionnels de l’enfance, des professeurs des écoles, des psychologues, des professionnels du champ éducatif et partagent le même constat : il est essentiel de travailler les compétences psychosociales et notamment la qualité des relations interpersonnelles chez les jeunes tant pour leur réussite professionnelle que pour leur bien-être personnel.
En 1993, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) introduit le concept de compétences psychosociales en le définissant comme la capacité d’une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne. Elles représentent l’aptitude d’une personne à maintenir un état de bien-être mental, en adoptant un comportement approprié et positif à l’occasion des relations entretenues avec les autres, sa propre culture et son environnement.
Avec l’objectif de mettre en avant et d’aider à développer toutes les actions de terrain qui tendent à améliorer ces relations interpersonnelles entre les individus, Faiseurs de liens a choisi de concentrer son travail en direction des plus jeunes.
En décidant d’intervenir au moment de la construction de la personnalité (enfance, adolescence, entrée dans le monde du travail), l’association se donne comme objectif de développer des situations dans lesquelles l’enfant ou l’adolescent parvient à renforcer sa compréhension des autres pour lui permettre d’être reconnu en tant que personne singulière.
Les actions proposées ont ainsi pour ambition de travailler à la fois sur la solidarité par le biais du partage d’expériences et sur le sujet par le développement des compétences psychosociales.
Pour Olivier Decroix : “Beaucoup d’actions sont menées sur le terrain mais elles ne sont pas ou peu valorisées et mutualisées. Contribuer à le faire, même modestement, nous apparaît indispensable.”
Valoriser les initiatives du terrain, tisser des liens
La méditation, la cohérence cardiaque, la danse en couple au service de l’amélioration des relations filles-garçons, un travail sur les émotions en cours de français à partir de la figure du monstre, un atelier pour se recentrer grâce au Chi Gong… Ces exemples sont autant d’actions à l’œuvre en milieu scolaire que l’association a recensées sur le territoire de l’ancienne région Poitou-Charentes. Son objectif : permettre à d’autres enseignants de déployer ces expériences dans leur classe. “Nous mettons les intervenants et les associés en contact afin d’enrichir les actions. L’intelligence collective et le partage d’expériences permettent d’aplanir bien des difficultés” explique Olivier Decroix.
Aujourd’hui le Centre de Formation des apprentis de Chantejeau (Poitiers) bénéficie d’un accompagnement des Faiseurs de liens dans son travail sur la remise en confiance des élèves en pré-apprentissage. “Nous avons aussi en projet de mettre en place des dispositifs d’écoute innovants en direction des apprentis afin qu’ils puissent échanger avec leurs pairs pour surmonter leurs difficultés relationnelles” indique Olivier Decroix.
Par ailleurs, l’association a récemment engagé des travaux sur l’égalité filles-garçons au travers d’actions qui auront vocation à sensibiliser aussi bien les apprentis que les lycéens et les écoliers. “Nous allons construire une immense bâche sur laquelle nous mettrons des images qui déclencheront des process de réalités augmentées. Cette bâche devrait faire l’objet d’une itinérance dans les villes et établissements de la région.”
Certaines actions sont extensibles à d’autres structures selon la nature de leurs projets et la composition du public visé. “La mosaïque que nous aimerions créer sur cette bâche pourra servir de support à des actions pédagogiques et éducatives en milieux scolaires mais aussi pour les centres culturels.”
Conserver leur élan malgré un contexte compliqué
Comme de nombreuses autres activités, le système scolaire est sujet aux mesures sanitaires liées à la crise que nous traversons. Après un lancement d’activité plébiscité par les enseignants, l’association constate un ralentissement dans le développement de son projet. La mise en œuvre de projets innovants sur le thème des relations interpersonnelles a souvent laissé place aux dispositifs de distanciation.
Olivier Decroix le constate. “L’impact est fort. Le système éducatif est très replié sur ses consignes sanitaires et ne produit plus d’actions exemplaires à médiatiser. Les dynamiques locales à appuyer sont très ralenties dans leur déploiement et doivent être repensées. Par ailleurs, de nouveaux besoins surgissent auxquels il faut tenter de répondre.”
Pour autant l’association, née quelques mois à peine avant le début de cette crise, poursuit ses travaux et se projette : “Notre rêve serait de devenir un pôle de référence dans le domaine de l’éducation au « bien vivre ensemble ». Cette crise aura servi au moins à rappeler cette banalité que la qualité de vie passe par les liens.”
Une rencontre sous le signe du jeu
Depuis la création de l’association, la Fondation Libellud soutient les Faiseurs de Liens dans le déploiement de leurs premiers outils de mobilisation et de valorisation ainsi que sur la structuration de leur projet. Notre rencontre doit beaucoup à une passion commune et à un outil éprouvé pour sa capacité à enrichir les compétences psychosociales : le jeu.
Olivier Decroix nous le rappelle. “J’ai connu la Fondation Libellud, quasiment dès sa création, par le FLIP de Parthenay qui en dehors d’être un des plus beaux festivals de jeux, est l’événement estival où l’on échange sur les projets des acteurs du monde ludique. Son soutien nous apporte les moyens d’actions indispensables pour notre développement et une crédibilité qui nous permet de solliciter d’autres partenaires et de renforcer ainsi notre dynamique. Cet entretien nous donne l’occasion d’exprimer notre gratitude à son endroit.”